CHRONIQUES SUR LE DEUIL
Quand la mort frappe, elle nous assomme au passage
Lors d'une opération chirurgicale, nous sommes anesthésiés afin de ne pas ressentir la douleur. Et c'est tant mieux, parce que sinon il y a fort à parier que nous nous effondrerions. Graduellement, les effets de l'anesthésie s'estompent et le mal commence à se faire ressentir... C'est un peu ce qui se produit lorsque nous apprenons le décès d'un proche, sauf que cela se déroule naturellement et inconsciemment.
Nous nous retrouvons sous le choc de cette violente nouvelle et ce, même dans les situations où la mort était prévisible. Assommés, déconnectés ou déroutés, nous avons besoin pour un temps de mettre la souffrance à distance et de ne pas croire complètement à ce qui vient de se passer: « Non, non, non ! Ça s'peut pas. C'est juste un mauvais rêve... »
Nos émotions sont gelées, inaccessibles pour des jours, voir des semaines. Certains peuvent se mépriser de ne rien ressentir. Honteux par exemple de rester de glace lors de l'enterrement d'une personne pourtant si importante... La panique et la profonde tristesse sont en veilleuse si bien que nous demeurons souvent en contrôle le temps d'organiser les funérailles, de régler les aspects légaux et financiers. Quelques semaines plus tard, quand l'absence se fait de plus en plus sentir et que la réalité s'impose durement, les émotions ressurgissent. Elles sont alors envahissantes, fracassantes. Surpris d'être submergés par notre peine, nous pourrions s'inquiéter et croire que notre situation se détériore... Or, bien au contraire, c'est la réaction de choc qui s'efface pour que commence la lente traversée du deuil.
Ce gel des émotions, bien que déconcertant, est normal et utile à court terme puisqu'il nous préserve d'une douleur insoutenable, affolante. Cette précieuse protection nous permet d'entrer à notre rythme dans une souffrance qu'il nous faudra visiter tôt ou tard.
Mélissa Raymond
Travailleuse sociale
Mélissa Raymond
travailleuse sociale